Rendre les vitres des trains perméables aux ondes sans les démonter
Alors qu’une bonne connexion au réseau est devenue une évidence pour les usagers, les vitrages isolants des trains ne laissent pas correctement passer les ondes téléphoniques. Pour compenser les pertes de transmission et assurer le confort des voyageurs, des répéteurs sont installés dans chaque wagon. Ces boitiers onéreux, peu écologiques et gourmands en énergie, doivent être changés au gré de l’évolution de la technologie. Pour pallier à ce problème, une spin-off de l’EPFL, nu glass, a mis au point un traitement des vitrages applicable sans les démonter. Le système a récemment été testé avec succès sur un wagon des CFF. Il représente en effet une économie importante pour les compagnies de chemin de fer et le consortium des opérateurs téléphoniques qui œuvrent ensemble pour équiper les wagons.
On ne badine pas avec l’isolation des wagons : près d’un tiers de l’énergie consommée par un train provient du chauffage et de la climatisation dans les voitures. Depuis une dizaine d’années, une couche métallique ultramince est insérée sur le verre. Elle multiplie par deux l’efficacité énergétique, mais rend le wagon hermétique aux ondes téléphoniques. Les opérateurs de téléphonie mobile et les exploitants ferroviaires n’ont donc d’autre choix que de placer des amplificateurs de signaux – ou répéteurs – dans chaque wagon. Cette solution s’avère toutefois onéreuse à l’installation comme à la maintenance et nécessite des remplacements réguliers en fonction de l’évolution de la technologie. « Il faut par exemple remplacer ces boitiers pour passer de la 4G à la 5G actuellement », note Luc Burnier. En outre, chaque répéteur nécessite une consommation électrique supplémentaire (jusqu'à 700 watts).
Une technologie mise au point au Laboratoire d’énergie solaire et physique du bâtiment de l’EPFL il y a quelques années avec des partenaires industriels parvient, grâce à un traitement laser, à créer des sillons microscopiques dans la pellicule de métal pour remédier au problème tout en n’altérant pas l’isolation thermique. Ce système est aujourd’hui utilisé par les fabricants de verres pour le traitement des vitrages neufs en usine. La majeure partie de la flotte n’est pourtant pas prête à être remplacée puisqu’un wagon a une durée de vie moyenne d’une trentaine d’années. La start-up nu glass a donc mis au point un système portatif qui permet le même traitement laser directement sur place.
Un système optique permet de suivre la courbure du wagon
Des lignes de quelques microns permettent le passage des ondes © 2022 Alain Herzog
Fixée dans un boitier qui vient se coller contre la vitre, la tête laser effectue le travail en une quinzaine de minutes. Il est ainsi possible de traiter un wagon en quelques heures. La difficulté technique pour la mise au point de ce système a été de lui apporter toute la précision nécessaire. Un système de mesure optique intégré au système portatif, développé au Laboratoire d’énergie solaire et physique du bâtiment de l’EPFL, place en permanence le faisceau dans la bonne position. « Cela permet par exemple de suivre des vitres courbes, même lorsqu’elles sont placées sur le toit des trains panoramiques », souligne Luc Burnier.
Soutenue l’année dernière par le programme InnoGrant de l’EPFL, la start-up a peaufiné son système qui vient d’être testé sur un wagon des CFF dans un hangar de Olten. Les résultats sont excellents. « La prochaine étape sera de traiter un wagon voyageant dans toute la Suisse afin de recueillir l’avis des usagers et de déployer la technologie en Suisse comme en Europe », conclut le CEO.